Solidarité avec les travailleurs égyptiens de l’usine de pneus Pirelli

Pirelli est le cinquième plus grand opérateur mondial, en termes de chiffres d’affaires, sur le marché des pneumatiques. Il est reconnu comme ayant un taux de profitabilité parmi les plus élevés. Son taux d’endettement devant être encore réduit à l’horizon 2014-2015. Pirelli dispose de 22 centres de production dans le monde et occupe 34’000 salarié·e·s.  Pirelli se vante, outre sa référence aujourd’hui obligatoire à son respect de l’environnement, «de réunir profitabilité financière avec responsabilité sociale». Sa filiale égyptienne semble confirmer, à sa façon, la convergence de ces deux objectifs!

Le Moyen-Orient représente 9% des ventes ; l’Europe 41% ; l’Amérique du Sud 34%; l’ALENA (Mexique, Etats-Unis et Canada) 10% et l’Asie Pacfique 6%. La stratégie du groupe consiste a diminué sa présence – en termes de nombre de salariés – en Europe pour la déplacer vers d’autres pays: la Russie et le Mexique, entre autres. Cela, tout en modernisant les fabriques et en mettant l’accent sur le haut de gamme. Les pneus pour automobiles et motos sont privilégiés par rapport aux pneus pour machines de chantier et autres engins industriels, etc.

En Egypte, comme l’expliquait, l’avocat Kaled Ali, directeur du Centre égyptien pour les droits sociaux et économiques : «Partout dans le monde, les ouvriers font la grève quand la négociation a échoué. Seul l’ouvrier égyptien fait la grève pour pouvoir ensuite négocier». (Al Ahram, 8-14 juin 2011). Le droit de grève n’est pas exactement un droit qui se trouve à la première place du programme du «président», nouvellement élu avec le consentement des militaires, Mohamed Morsi, le candidat des Frères musulmans. Nous y reviendrons.

Depuis la rédaction de ce communiqué de la Fédération des syndicats indépendants, les ouvriers de Pirelli ont fait un sit-in devant le consulat d’Italie, à Alexandrie. Ils ont interrompu leur action après avoir été reçus par le consul d’Italie et obtenus la promesse que leurs revendications seraient transmises à la direction du holding Pirelli et au gouvernement italien.

Les messages de solidarité syndicaux doivent être envoyés aux adresses e-mail suivantes: efitu.union@gmail.com et  fatmaramadan66@gmail.com

(Rédaction A l’Encontre)

*****

Des travailleurs de l’entreprise de pneus Pirelli, sise à Alexandrie, en Egypte, sont en grève, suite au refus arbitraire de la part de la direction d’appliquer les accords qui ont été conclus avec les travailleurs en présence des représentants du Conseil suprême des forces armées (CSFA), le vrai pouvoir, et suite à leur refus de respecter les droits légaux des travailleurs. L’usine Pirelli est située sur la route du désert entre Le Caire et Alexandrie. Le groupe Pirelli a des filiales de production de pneus dans de nombreux pays, dont les Etats-Unis, l’Allemagne, la Turquie, l’Italie, la Grande-Bretagne, la Roumanie et le Brésil, le Venezuela, la Chine.

Le Comité syndical chez Pirelli, qui est affilié à l’officielle Union générale des travailleurs de la chimie (GUC), elle-même affiliée à la Fédération Syndicale égyptienne (ETUF), d’obédience gouvernementale, s’est efforcé de respecter les lois, très compliquées, sur les grèves. Le 29 mai 2012, le Comité syndical a envoyé un mémorandum au Ministre du travail, au directeur du Conseil de contrôle de la main-d’œuvre à Alexandrie, au directeur exécutif de la compagnie, ainsi qu’au GUC. Par ce document, il les informait de l’intention des travailleurs de se mettre en grève le 10 juin 2012. Il demandait que la direction respecte les droits des travailleurs pour éviter un arrêt de travail. Les revendications des travailleurs ont été ignorées. Dès lors, ils ont été obligés de passer à l’action.

Les raisons de la grève sont les suivantes

La compagnie a violé l’article 85 de la Loi sur le Travail (Loi 12 de 2003) concernant les calculs des primes pour les heures supplémentaires des travailleurs. La compagnie calcule les heures supplémentaires sur la base du salaire de base plutôt que sur celui du salaire total, comme cela est stipulé par la loi.

La compagnie a violé les règlements sur les primes qui stipulent que la réduction des primes de production doit être faite à un taux de 10% par 0.1% de volume produit endommagé, lorsque le taux de production altérée atteint 2%. La compagnie applique les réductions déjà à partir d’un taux de malfaçon de 1.4%.

La compagnie viole la convention nationale du travail entre travailleurs et employeurs. Alors que la convention prévoit pour 2011 le paiement d’une allocation spéciale aux travailleurs sur la base du salaire de base, la direction calcule l’allocation sur la base de la proportion de salaire soumise à l’indemnité de licenciement, qui est inférieure de manière significative au salaire de base.

La direction a violé la convention collective nationale signée en présence de représentants du CSFA, en février 2011. Cette convention prévoit la participation des travailleurs aux décisions concernant les prestations auxquels ils ont droit, tels que les soins médicaux, le transport, ainsi que les modalités de paiement des primes. La direction n’a pas tenu compte de cette disposition.

Les règlements concernant les salaires ont été modifiés sans que ces changements aient été approuvés par l’autorité administrative responsable, ce qui est contraire aux règlements.

Le droit des travailleurs d’obtenir 10% des bénéfices de l’entreprise n’a pas été respecté. En 2011, par exemple, les bénéfices nets de la compagnie se montaient à 130 millions de livres égyptiennes. Pourtant la direction n’a versé que 9 millions de livres (1,4 million de CHF) aux travailleurs au lieu des 13 millions auxquels ils avaient droit.

Contrairement à ce qu’elle pratique dans d’autres pays, l’entreprise n’assume pas sa responsabilité en ce qui concerne les soins de santé pour les travailleurs et leurs familles, de même que pour l’adaptation du salaire au taux d’inflation et à l’augmentation des prix des biens de base, etc.

Il faut noter qu’au lendemain de l’envoi du mémorandum, l’entreprise a coupé la vapeur et l’électricité pour les machines et a entamé des opérations de maintenance pour les chaudières et les centrales électriques. Dans une déclaration faite à la police, elle a dénoncé les travailleurs et leur comité syndical en les accusant d’entraver la production et d’inciter à la grève [ce qui est illégal]. Pour leur part, les travailleurs ont déposé une plainte démontrant que c’est la direction qui bloquait la production. Les travailleurs ont également fourni des preuves de l’opération de maintenance.

La direction de l’entreprise a refusé de négocier. Le Ministère du travail n’a pas répondu au mémorandum des travailleurs. En ce qui concerne le GUC, il a répondu au Comité syndical, le 9 juin 2012, en annonçant son soutien à la grève qui commencerait le 10 juin 2012. Depuis lors, les travailleurs ont été en grève, alors que la direction refuse toujours de négocier, en insistant sur le fait que les travailleurs doivent retourner à leurs postes avant que la direction ne prenne en considération leurs revendications; ce que les travailleurs rejettent.

Mais la direction ne s’est pas contentée de cela. Le 21 juin 2012, elle a licencié cinq travailleurs en les accusant d’incitation à la grève. Les travailleurs licenciés sont: Shaaban Abdel-Latif Yussef, technicien de production, degré un; Ashraf Khamis, connu aussi sous le nom de Ashraf El-Gazzar, technicien de production, degré un; l’ingénieur Ahmed Kandil, dirigeant du comité syndical; l’ingénieur Ashraf Ashmawi, membre du comité syndical et président de l’association des salariés actionnaires de la compagnie; et, enfin, Mohamed Jarrana, membre du comité syndical.

Pirelli est une compagnie qui a obtenu d’énormes profits en Egypte, mais ne tient  compte ni de la loi égyptienne, ni des droits des travailleurs égyptiens. Les travailleurs n’ont opté pour la grève qu’après avoir tenté à plusieurs reprises de résoudre les problèmes par un dialogue, sans résultat. Leur grève est un des rares arrêts de travail «légaux» en Egypte, puisqu’elle remplit les conditions très strictes fixées par la loi égyptienne pour l’exercice de ce droit fondamental des travailleurs, y compris l’approbation de la grève par le GUC. Les travailleurs n’ont eu recours à la grève que lorsque les ministères responsables ont ignoré les revendications légitimes des travailleurs. Et, en particulier, lorsque le Ministère du travail a réagi avec indifférence aux difficultés des travailleurs.

La Fédération égyptienne des syndicats indépendants (EFITU) exprime sa solidarité avec la grève des travailleurs de la compagnie de pneus Pirelli et elle soutient leurs revendications légitimes. La EFITU demande que les cinq travailleurs licenciés soient réintégrés. Elle fait appel aux forces politiques et à la jeunesse égyptienne ainsi qu’aux syndicats et aux fédérations syndicales à un niveau international – et en particulier aux travailleurs de Pirelli dans d’autres pays – pour qu’ils manifestent de toutes les manières possibles leur solidarité avec leurs camarades égyptiens, pour les aider à résister et à persévérer dans leur lutte jusqu’à ce que leurs revendications soient satisfaites.

Pour tenter d’obliger les travailleurs à se soumettre, la direction de Pirelli menace de ne pas verser leurs salaires, puisqu’elle sait que c’est là le seul moyen de subsistance pour eux et pour leurs familles. Au lieu de satisfaire les revendications légitimes des travailleurs, la compagnie a opté pour des licenciements arbitraires et une suspension de la paie.

Vive la lutte des travailleurs égyptiens. Vive la révolution égyptienne !

Fédération égyptienne des syndicats indépendants, 21 juin 2012 (Traduction A l’Encontre)

 

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*