Etats-Unis. Sous les coups de la récession qui vient: 43 millions de personnes sans couverture maladie

Par Julia Conley

Dimanche 10 mai, des partisans de Medicare for All [1] ont attiré l’attention sur les résultats d’une étude récente consacrée à la crise imminente de l’assurance maladie. Cette crise est apparue avec la pandémie du coronavirus, qui a causé plus de 33 millions de pertes d’emploi au cours des deux derniers mois.

L’assurance maladie est liée à l’emploi pour près de la moitié du pays, pour 160 millions de personnes. Une étude récente de la Fondation Robert Wood Johnson (RWJF) et du Urban Institute estime que 43 millions de personnes pourraient perdre leur assurance maladie avec leur emploi en raison de la pandémie.

Ces analystes indiquent que ce nombre sera atteint lorsque le taux de chômage aura atteint 20%. Selon le ministère du Travail, il s’élèverait actuellement à 14,7%. Mais certains économistes calculent qu’en réalité entre 19% et 23,6% des Américains seraient déjà sans emploi, si on tient compte du nombre de celles et de ceux qui ont perdu leur emploi au cours des deux dernières semaines ainsi que du nombre de celles et de ceux qui n’ont pas déposé de demande de chômage.

La pandémie «révèle de nombreuses insuffisances de notre système», déclare à The Guardian Katherine Hempstead, cheffe analyste des politiques publiques au RWJF, ajoutant «(qu)’il n’y a pas de véritable raison à ce que les soins de santé soient liés à l’emploi».

Sur les réseaux sociaux, Veronikka Ziol (démocrate), candidate au Congrès de l’Indiana, expose pourquoi le système américain lie l’accès aux soins médicaux à l’occupation d’un emploi: «C’est la carotte au bout du bâton, agitée devant le nez de la classe ouvrière. Faites ce que nous voulons pour la bouchée de pain que nous vous payons, ou vous ne pourrez plus vous faire soigner.» «Voilà pourquoi nous avons besoin de Medicare for All», a-t-elle ajouté.

Le mois dernier, l’Economic Policy Institute (EPI) estimait déjà que 12,7 millions de personnes avaient perdu l’assurance maladie qui était associée à leur emploi [2].

Parmi les salarié·e·s licenciés ou démissionnaires perdant leur assurance, 7 millions d’entre eux, selon RWJF et l’Urban Institute en resteront dépourvus – incapables d’accéder aux soins de santé dispensés par Medicaid ou COBRA, la loi qui permet aux Américains de payer eux-mêmes les primes de l’assurance maladie qu’avait souscrite leur ancien employeur, dont le montant peut représenter des centaines de dollars par mois pour une couverture individuelle.

Aux 27 millions de personnes déjà privées d’assurance avant la pandémie s’ajoute désormais la foule de ces millions de personnes supplémentaires. La RWJF et l’Urban Institute expriment leur inquiétude. Beaucoup parmi ces millions de personnes vont éviter des frais médicaux s’ils commencent à ressentir les symptômes du coronavirus, et augmenter de la sorte le risque de propager la maladie dans leur entourage, rendant plus difficile dans l’ensemble du pays la lutte contre la pandémie.

«Le système américain de financement des soins de santé n’a pas été conçu pour résister au double impact d’une pandémie et d’une récession», a déclaré le Dr Adam Gaffney, président du Physicians for a National Health Program au Guardian: «Il est inévitable que des gens meurent parce qu’ils ne peuvent pas recevoir les soins dont ils ont besoin, à cause de la récession qui se profile à l’horizon.» (Article publié sur le site Common Dreams en date du 10 mai 2020; traduction de la rédaction A l’Encontre)

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[1] Medicare For All: un système universel d’assurance maladie pour tous et toutes, thème qui a été popularisé par Bernie Sanders. (Réd.)

[2] Elise Gould, citant un rapport EPI du 8 mai, informe que 20,5 millions d’emplois ont été perdus en avril 2020. (Réd)

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