Déclaration de solidarité avec le peuple grec

Nous publions, ci-dessous, la déclaration de solidarité qui nous a été envoyée par le SEK (Parti socialiste ouvrier de Grèce), membre de la coalition nommée Antarsya (Front révolutionnaire anti-capitaliste). Cette déclaration exprime l’urgence d’une campagne de solidarité avec les masses laborieuses de Grèce qui subissent la plus violente offensive antisociale depuis la Seconde Guerre mondiale et qui voient les éléments les plus élémentaires  d’une démocratie parlementaire bourgeoise dite représentative mis en question. La différence que nous pouvons avoir avec le choix revendiqué d’une sortie de l’euro telle qu’exprimée dans cette déclaration de solidarité – voir à ce propos, sur ce site, l’article, en date du 13 janvier 2012, avec lequel nous sommes en syntonie: Antonis Davanellos, Euro ou drachme?  – ne fait en aucune mesure obstacle à l’essentiel: le développement du plus large mouvement de solidarité en Europe avec la lutte du peuple grec; une solidarité qui pourrait être un élément qui favorise une unité d’action des forces se situant, pratiquement, à la gauche du PASOK. (Rédaction A l’Encontre –  26 février 2012)

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L’austérité domine aujourd’hui les politiques économiques du monde capitaliste avancé. En réponse à la crise mondiale provoquée par la conduite dite spéculative des grandes banques, les classes dominantes occidentales ont choisi d’en faire porter le coût sur le dos des travailleuses et travailleurs ainsi que des pauvres. Les coupes claires dans les dépenses publiques ont enserré le monde dans une croissance faible. Elles ont également fourni une possibilité aux marchés financiers, en priorité, d’échapper aux contrôles grâce à la mise en place de nouvelles «réformes» néolibérales.

Il s’agit du sort tragique de la Grèce que de servir de terrain d’essai dans l’application de ces politiques. L’eurozone vient juste d’approuver un second paquet de «sauvetage» de la Grèce. Il s’agit en fait d’un sauvetage de banques principalement françaises et allemandes qui ont prêté à la Grèce l’argent qu’elle doit rembourser en ce moment. Ce fait est rendu visible par la création d’un compte bloqué sur lequel les paiements du service des nouveaux prêts seront remboursés et sur lequel les «remboursements» des prêts des banques devront être effectués avant qu’un centime n’atteigne la Grèce.

Les gens ordinaires de Grèce sont en train de payer un prix terrible pour ce «sauvetage bancaire», comme pour ceux qui l’ont précédé. La récession économique a atteint un rythme jamais vu depuis le Grande Dépression des années 1930 (7% l’année dernière de chute du PIB, un niveau probablement semblable pour 2012) alors que s’accroissent le chômage, le nombre de sans-logis et les suicides. Les soupes populaires se propagent tandis que les riches s’assurent de mettre en sûreté leurs fortunes [entre autres en Suisse]. Les principaux partis grecs sont en train de coopérer dans la mise en œuvre de coupes encore plus implacables que les précédentes (réduction de 22 % du salaire minimum, réduction supplémentaires de 15 % des retraites et suppression de 15’000 postes de fonctionnaires) avec la troïka – composée de la Banque centrale européenne, de la Commission européenne et du Fonds monétaire international – qui n’a de cesse de serrer les vis.

La mise en œuvre de l’austérité nécessite une érosion massive de la démocratie. Des gouvernements «technocratiques» [Lucas Papadémos] ont été imposés à la Grèce et à l’Italie [Mario Monti]; le report des élections parlementaires qui doivent se tenir en avril 2012 en Grèce a été demandé par des politiciens d’Europe du Nord; la souveraineté économique de la Grèce a été effectivement suspendue alors que la troïka exerce un contrôle minutieux  et croissant sur les ministères et que la police antiémeute attaque de manière vicieuse les manifestant·e·s et les grévistes. Il ne s’agit pas du problème exclusif de la Grèce: il est apparu qu’en novembre les parlementaires allemands ont obtenu les détails du prochain budget irlandais bien avant qu’il n’ait été soumis au Dail [Chambre des députés].

Afin d’affaiblir partout tout opposition à l’austérité, il est fait de la Grèce un exemple. Les propres analyses secrètes de l’eurozone [la zone euro] concèdent pourtant que cette politique est vouée à l’échec. Les coupes dans les dépenses publiques réduisent la demande d’emplois ainsi que de services et, ainsi, provoquent une contraction de l’économie [récession, dépression] rendant plus difficiles à atteindre les objectifs de remboursement de la dette. Les pays pratiquant l’austérité sont en train de reproduire le châtiment de Sisyphe, lequel, selon la légende classique, était condamné à rouler éternellement un rocher au sommet d’une colline avant que celle-ci ne dégringole à nouveau.

La Grèce possède heureusement le mouvement des travailleuses et des travailleurs le plus militant d’Europe. Les politiques d’austérité ont été contestées par grève générale après grève générale aussi bien que par une succession de manifestations de masse. Les travailleuses et travailleurs, à la base, font pression sur leurs dirigeants syndicaux; de même ils engagent des actions plus militantes. Les deux principaux partis (PASOK et Nouvelle Démocratie] sont en crise, souffrant de scissions et expulsant un nombre important de leurs député·e·s. Dans les sondages, la gauche se situant à la gauche du parti social-libéral PASOK [KKE, Syrisa, Antarsya] reçoit un appui d’environ 40% des personnes interrogées. Une gauche révolutionnaire anticapitaliste émerge et soutient les luttes ascendantes.

Si ces résistances deviennent plus fortes et plus ciblées, il est possible que se dessinent les bases d’un programme de politiques qui rompent avec l’austérité et le néolibéralisme. Ces politiques incluraient le refus de payer la dette ainsi que la sortie de la zone euro, le refus du sauvetage du capitalisme grec et créeraient un cadre pour des mesures fondées sur la nationalisation des banques et un programme d’investissements publics, qui donnerait la priorité aux emplois, aux services et au niveau de vie. Ces mesures feraient partie d’une lutte plus large qui ne défendrait pas seulement la démocratie, mais l’approfondirait au travers d’un contrôle des travailleuses et des travailleurs sur l’économie. Ce processus ouvrirait des perspectives plus larges d’une planification socialiste et démocratique comme alternative au chaos et à l’injustice du capitalisme.

La lutte des travailleuses et travailleurs, des étudiant·e·s et des pauvres de Grèce est aussi notre lutte. S’ils/elles gagnent, il sera plus difficile de mettre en œuvre les politiques d’austérité ailleurs. S’ils/elles perdent, alors les plans – qui ont été approuvés par la plupart des pays membres de l’Union européenne (UE) – visant à rendre l’austérité permanente seront plus aisés à mettre en place. Nous nous engageons à faire une campagne de solidarité avec la lutte du peuple grec contre l’austérité. Ce qui ne signifie pas seulement de soutenir la résistance grecque. Plus notre propre lutte contre l’austérité dans nos propres pays sera efficace, plus nos frères et sœurs de Grèce auront de chance de gagner. (Traduction A l’Encontre)

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