La «Grande Coalition» en Allemagne

Le président du SPD, Sigmar Gabriel, annonce le «Oui» à la Grande   coalition, le 14 décembre 2013
Le président du SPD, Sigmar Gabriel, annonce le «Oui» à la Grande Coalition, le 14 décembre 2013

Par Manuel Kellner

La CDU (Union chrétienne-démocrate d’Allemagne) et la CSU (Union chrétienne-sociale en Bavière) et le SPD (Parti social-démocrate d’Allemagne) ont conclu un accord pour former une coalition gouvernementale. Les résultats ont été approuvés par la CDU dans un «Kleiner Parteitag» (« Petit Congrès », en fait une sorte de direction élargie). Le SPD a soumis la décision à ses 475’000 membres, grâce à un vote par correspondance: 76% des votant·e·s ont dit «Oui» à la direction, selon les résultats donnés le 14 décembre.

Au début, il y avait beaucoup de protestations de sections locales, des jeunesses socialistes, même de sections régionales – par peur de se retrouver dans une politique encore une fois trop droitière, et peut-être surtout par peur de sortir encore plus affaibli au point de vue électoral, après avoir été encore une fois le partenaire junior des chrétiens conservateurs sous le commandement de la chancelière Angela Merkel.

La ministre présidente social-démocrate de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, Hannelore Kraft, considérée comme personne montante dans la hiérarchie du SPD au niveau fédéral, s’était même faite la porte-parole des mécontents dans le parti. Mais, après un certain temps, elle avait fait volte-face en appelant à se prononcer pour la grande coalition. Cela même si le parti, dans sa campagne électorale, avait toujours souligné qu’il n’en voulait pas. Ce n’est pas par hasard qu’elle, ainsi que les autres leaders du parti, avait obtenu des résultats assez maigres quand ils s´étaient présentés pour les postes de direction lors du récent congrès du SPD.

Le caractère «démocratique» du vote de la base du parti doit être fortement relativisé. Quel est le choix, auquel les membres du SPD étaient confrontés? En fait, ce n’était pas l’assentiment ou le rejet des quelque 180 pages de l’accord de coalition nationale. Tous les dirigeants du SPD avaient déjà signé et exprimé leur accord publiquement, avant toute consultation de la «base» du parti. La vraie question, à laquelle les membres avaient à répondre, était en fait la suivante: «Voulez-vous éviter une crise de votre parti en ne désavouant pas complètement la direction et quasiment tous ses leaders connus au niveau fédéral et international?» Vu sous cet angle, le «oui» de la grande majorité des membres du SPD n’est pas vraiment surprenant…

Pour l’essentiel, la politique esquissée par cette lettre d’intention qu’est l’accord de coalition est la continuité des grands choix qui avaient déjà caractérisé l’orientation du gouvernement sortant de la chancelière Angela Merkel. Ce dernier n’était pas seulement un gouvernement de la CDU-CSU avec les libéraux du FDP (Parti libéral-démocrate), mais aussi un gouvernement de «grande coalition» informel avec le SPD.

En effet, la politique du «frein à l’endettement» – c’est-à-dire des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises et fortune ainsi que des «aides» faites aux banques, au détriment des budgets publics – s’était faite avec l’accord de la social-démocratie, tout comme la transformation de la Bundeswehr, de l’armée allemande – qui, d’après le « Grundgesetz», la Constitution allemande, est vouée exclusivement à défendre le pays contre des agresseurs – en une armée d’intervention jouant un nouveau rôle de gendarme, en collaboration avec les Etats-Unis et les membres de l’OTAN.

En matière d’écologie, le texte fondant la coalition projette une politique absolument rétrograde. C’est le frein au développement des énergies alternatives, et c’est l’ouverture de la boîte de Pandore pour la production d’énergie par le charbon. C’est une politique réactionnaire.

Ceci vaut à plus forte raison pour la politique européenne. Le SPD soutient la politique des mémorandums, des programmes d’austérité cruels, imposés à la Grèce, aux pays de l’Union européenne économiquement plus faibles. Une politique qui jette des millions de personnes dans la misère et le désarroi. Qui plus est, les catastrophes des «réfugiés de la Méditerranée» sont combattues par le renforcement du dispositif qui contribue à les produire. Ainsi, les acteurs de la «grande coalition» ont comme orientation: renforcer Frontex, renforcer la forteresse européenne, envoyer des drones, et renforcer la propagande dans les pays d’où viennent les gens qui fuient la misère, l’oppression ou la guerre, pour leur dire qu’il ne vaut pas la peine de venir en bateau, parce qu’on meurt ou parce qu’on n’a pas d’avenir et de place dans le «paradis européen».

Il est vrai qu’il y a des déclarations d’intention dans le texte d’accord qui pourraient générer des progrès partiels dans le domaine du social. Citons par exemple la «Mütterrente», c’est-à-dire l’extension de la rémunération en matière des retraites pour les parents qui ont consacré une partie de leur vie à l’éducation de leurs enfants. Ces avantages n’existaient jusqu’ici que pour l’éducation des enfants nés à partir de 1992. Maintenant, ils doivent aussi s’appliquer aux parents d’enfants nés avant 1992.

Mais il y a d’autres détails de l’accord bien moins réconfortants. La CSU bavaroise, très conservatrice, avait déjà obtenu par vote au Bundestag une sorte de «prime» pour les parents qui s’abstiennent de mettre leurs enfants dans les crèches et jardins d’enfants publics, ce qui est cher et détourne des fonds publics destinés à améliorer l’offre publique pour des garderies de qualité. Or, cette offre est toujours notoirement médiocre et arriérée en Allemagne. La «grande coalition» ne va pas corriger cette situation.

Même si le FDP libéral n’a pas pu obtenir les 5% des voix pour entrer encore une fois au Bundestag, les privilèges fiscaux pour les hôteliers, qui avaient été introduits sous sa pression par le gouvernement sortant d’Angela Merkel, restent en vigueur. Et la CSU bavaroise a pu imposer son thème principal de campagne électorale: l’introduction d’un péage pour les autoroutes d’Allemagne exclusivement pour les automobilistes «étrangers», bien qu’il ne soit pas du tout clair si cela est conforme avec le droit européen.

La «conquête» du salaire minimum

Le salaire minimum légal (donc fixé par une loi) de 8,50 euros (donc inférieur à celui établi en France) était une des revendications principales du SPD dans sa campagne électorale. Pendant les négociations, les leaders du SPD ne cessaient de répéter publiquement qu’ils n’allaient pas céder sur ce point. Il ne pouvait ni être question d’accepter un salaire minimum au-dessous des 8,50 euros, ni un «salaire minimum» non légal par accord des «partenaires sociaux», soit les organisations patronales et les syndicats (voir : NachDenkSeiten. Die kritische Website, du 5 décembre 2013).

Puisque le SPD n’a littéralement rien obtenu dans le domaine de son autre revendication principale, voire un réajustement des impôts visant les gros revenus et la réintroduction d’impôts sur les grandes fortunes, il fallait bien que le résultat des négociations puisse être présenté sous l’emblème du «salaire minimum de 8,50 euros». Quelques précisions utiles.

Tout d’abord, il y a en Allemagne 6,9 millions de salarié·e·s qui gagnent moins que 8,50 euros brut par heure; 2,7 millions d’entre eux et d’entre elles travaillent à temps plein. Un tiers travaille pour des entreprises soumises au régime des tarifs fixés par conventions collectives.

Il faut se rendre compte également que pour une semaine de travail de 40 heures, les 8,50 par heure donnent au maximum 1450 euros mensuels. C’est juste à la limite légale pour éviter la saisie salariale en cas de poursuites. Le temps de travail hebdomadaire considéré comme normal étant de 38 heures par semaine, les personnes concernées obtiennent une rémunération au niveau des minima sociaux. Si leur revenu doit leur permettre de faire vivre une famille, ils devront le faire compléter par les organes distribuant de l’argent à titre de l’allocation au chômage de deuxième ordre (Arbeitslosengeld II). Un tel revenu, bien entendu, ne génère pas de d’allocation de retraite au-dessus du seuil de pauvreté officiel.

Or, seulement une partie des salarié·e·s concerné·e·s vont obtenir un nouveau salaire minimum les prochaines années. Jusqu’à la fin de l’année 2016, les accords salariaux conclus par conventions collectives avec des salaires inférieurs à 8,50 euros – ils sont nombreux, notamment,  dans les services de sécurité, les blanchisseries et dans le secteur en augmentation permanente du travail intérimaire recrutant les «esclaves modernes» – restent en vigueur. C’est seulement à partir du premier janvier 2017 que le salaire minimum est généralisé. Avant, les syndicats des secteurs concernés pourraient éventuellement résilier la partie des conventions arrivant à échéance pour obtenir le salaire minimum plus tôt, entrant automatiquement en vigueur dans ces cas-là. Mais des «syndicats» jaunes – comme les syndicats chrétiens du CGB (Confédération syndicale chrétienne) – auraient alors le droit de conclure des accords avec des salaires inférieurs aux 8,50 euros par heure…

Pour les autres secteurs, les 8,50 euros entrent en vigueur à partir du premier janvier 2015. Mais si on prend en compte un taux d’inflation de 2% (c’est ce que la BCE projette), ces 8,50 euros n’auront plus qu’un pouvoir d’achat de 7,85 euros. En tenant compte de la croissance de la productivité, en 2017, il faudrait un salaire minimum de 9,70 euros pour compenser inflation et hausse de la productivité…

Mais ce n’est pas tout. D’après l’accord, une commission composée de représentants des organisations patronales et des syndicats ainsi que de «spécialistes» en économie aura à juger, en juin 2017, du niveau atteint par le salaire minimum. Cela pour l’adapter aux «circonstances générales». Et est laissée ouverte la possibilité d’une adaptation vers le bas! La décision de cette commission sera appliquée en pratique dès le 1er janvier 2018.

Donc, tout n’est pas si clair dans le domaine du «grand gain» du SPD au cours des négociations pour l’accord de coalition.

Il reste que peut-être, dans cinq ans, plus personne ne parlera des «nuances» mises en lumière ici. Car l’introduction d’un salaire minimum en Allemagne est quand même la nouveauté principale. Les directions syndicales avaient, par ailleurs, appelé leurs membres dans le SPD à voter pour l’accord de grande coalition. Elles insistaient particulièrement sur le gain obtenu en matière de salaire minimum.

Le salaire minimum de 8,50 euros en Allemagne – en laissant de côté ses aspects fictifs – doit être comparé à ceux en vigueur dans les 22 pays de l’UE qui disposent d’un salaire minimum légal. Il occupe la sixième place après le Luxembourg (11,10 euros), la France (9,43 euros), la Belgique (9,10 euros), les Pays-Bas (9,07 euros) et l’Irlande (8,65 euros). Il se situe certes avant la Grande- Bretagne (7,78 euros). A partir de la 8e place, c’est la «vallée des larmes» («Tal der Tränen»), allant de la Slovénie (4,53 euros) en passant par la Pologne (2,92 euros) pour arriver au fond de la vallée, avec la Bulgarie (0,95 euro!).

Dans les statistiques prenant en compte le pouvoir d’achat réel, l’image ne change pas beaucoup. L’Allemagne reste en 6e place, après les mêmes pays, mais avec seulement 7,40 euros. La Pologne est un peu mieux placée avec 3,78 euros et la Bulgarie grimpe à l’avant-dernière place avec 1,90 euro. La Roumanie ferme la marche avec 1,85 euro (voir WSI, Hans Böckler Stiftung, Pressedienst, 6 novembre 2013).

Avancée ou régression sociale continue?

Parlons maintenant du deuxième grand gain du SPD, soit la retraite à partir de 63 ans sans déductions. C’est sous cette forme que cela est présenté au «grand public». Le SPD, co-architecte et complice de l’introduction de la retraite à partir de 67 ans, avait voulu regagner des sympathies en matière de politique sociale. Ainsi, il affirmait que des salarié·e·s ayant 45 années d’assurance devraient avoir droit à 100% de leur allocation de retraite. Les conservateurs chrétiens du CDU et du CSU avaient donc à «donner» quelque chose dans ce domaine…

Il faut tout d’abord être conscient que les trajectoires de vie au travail impliquant 45 années de participation aux assurances sociales deviennent de plus en plus rarissimes. Il s’agit donc d’une réforme dont une «mince» couche pourrait profiter. Et certainement une couche encore plus étroite pour ce qui est des jeunes générations…

Mais dans le texte de l’accord conclu il se trouve une formule plus restrictive: il n’est plus question de 45 ans de participation, mais de 45 ans de paiement de cotisations. Par exemple, pour les années de chômage, il n’est pas clair si les personnes touchant l’allocation au chômage II – qui ne paient pas de cotisations de retraite – verront leurs années de chômage déduites des 45 ans ou pas. Et pour les années d’éducation, s’il y en a plus que trois ainsi que pour les années de formation professionnelle, la situation n’est pas plus claire.

Il faut ajouter à cela qu’à partir de 2015 les retraité·e·s jouissant du nouveau règlement n’auront pas vraiment leur retraite  «à 63 ans» sans déductions. Car l’âge minimum donnant droit à la retraite monte peu à peu aussi pour celles et ceux qui ont cotisé pendant 45 ans. En janvier 2015, c’est déjà 63 ans plus un mois, et en 2030 on arrive déjà à 65 ans!

Mais il y a aussi la «Lebensleistungsrente» (la pension prenant en compte le travail domestique, l’éducation des enfants), une sorte de retraite minimum. Il était question d’un montant de 850 euros, mais ce chiffre ne se trouve pas dans le texte de l’accord. Mais «en principe» l’accord stipule l’introduction de cette nouvelle forme de pension.

Peut-être va-t-elle être introduite avec un minimum plus bas. Mais il y a aussi un problème systémique (violemment  dénoncé par Norbert Blüm (voir Süddeutsche Zeitung du 2 décembre 2013), l’ancien ministre du Travail, faisant partie de «l’aile sociale» de la CDU. La solidarité institutionnalisée est mise en question et cette réforme approfondit un mixte de l’assurance sociale et de l’assistance sociale. Les retraites sont en principe financées par les cotisations des salarié·e·s. Déjà avant les réformes Hartz (l’homme des contre-réformes sous Schröder), la «Arbeitslosenhilfe» (maintenant l’«Arbeitslosengeld II») était financée partiellement en dehors de ce système. Maintenant, l’assurance chômage pour les chômeurs et chômeuses de moyenne et longue durée est devenue une allocation sociale conditionnelle. Elle soumet les personnes concerné·e·s à une procédure très répressive de contrôle pour voir, si elles sont «dans le besoin» ou pas.

La retraite minimale signifie que celles et ceux qui ont une retraite plus basse que la somme fixée – mettons 850 euros – auront le droit de faire compléter leur pension jusqu’à ce montant. Et les coûts seront financés en dehors du système de l’assurance sociale par des prélèvements fiscaux. Entre autres, ce système signifie qu’un salarié à temps plein, touchant un salaire bas, ayant cotisé toute sa vie active pour arriver à une retraite de 850 euros, aura la même rémunération qu’un salarié ayant travaillé le même nombre d’années, peut-être bien mieux payé, mais à temps partiel. Cela implique un problème de justice sociale évident. On peut penser que ce genre de règlement sert surtout à discréditer du système d’assurance sociale afin d’arriver plus vite à la réalisation du modèle libéral. D’une part, une assistance sociale située à un niveau misérable, et, d’autre part, la généralisation de la responsabilité privée de chaque individu de s’assurer contre les «inconvénients»  de la vieillesse, de la santé ou du chômage, en enrichissant les sociétés d’assurance privées.

Après la «grande coalition», quelle autre coalition?

La dimension relevant de la démocratie, à la lumière de la situation nouvelle au parlement fédéral de l’Allemagne, semble précaire. Les partis soutenant le gouvernement de la grande coalition disposent de quelque 80% des députés au Bundestag. Mais, en plus,  les partis de la coalition ont signé un accord contenant un grand effort de discipline. En effet, on peut y lire que les fractions parlementaires des partis de la coalition gouvernementale «votent toujours de manière unitaire», et que «des majorités changeantes sont exclues». Voilà un «centralisme» assez autoritaire.

Que signifie en somme ce gouvernement de «grande coalition» pour les syndicats, pour les mouvements sociaux et pour la gauche politique? En principe, le parti de La Gauche («Die Linke») est bien placé, puisqu’il dispose de quasiment la plus forte fraction d’opposition au Bundestag. Cela offrirait la possibilité d’exploiter les chances de mobiliser l’opinion publique, les «mécontents», les mouvements sociaux contre cette confrérie de la politique dominante, qui s’efforcera d’intégrer encore plus que le gouvernement sortant d’Angela Merkel. D’intégrer et de pacifier, entre autres, les directions syndicales (qui le sont déjà), tout en s’appuyant sur la «communauté du bien-être relatif» en comparaison avec les plus précaires, en Allemagne et ailleurs.

Il y a toutefois un petit problème. En pleine négociation avec le CDU et le CSU, la direction du SPD avait annoncé un changement de stratégie. Elle a déclaré publiquement: «Nous n’exclurons plus jamais une possible coalition avec le parti Die Linke.» Donc, dans les années à venir, jusqu’aux probables prochaines élections fédérales en 2017, les forces millérandistes [référence à A. Millerand entré dans le gouvernement français en 1899] co-gouvernementalistes au sein du parti Die Linke pourraient se trouver encouragées dans l’imposition d’un cours adaptationniste qui pourrait rendre possible la participation à un gouvernement dirigé par le SPD en 2017.

Le prix en serait très élevé. Tout d’abord, en matière de politique extérieure, car il faudrait consentir à soutenir des guerres d’intervention. Ensuite, en matière de politique économique et sociale, car il faudrait soutenir une politique de «discipline budgétaire» et donc d’austérité, appliquée au «sud de l’Europe» et en Allemagne.

Donc, le débat dans la gauche allemande doit être orienté vers des solutions et des pratiques de solidarité combattant la logique infernale de la concurrence. Pour l’action venant d’en bas, transcendant les frontières des localités, des secteurs et des Etats, pour l’élaboration de revendications et de plans d’actions unitaires pour les syndicats et les mouvements sociaux en Europe, pour un renouveau démocratique, social et écologique de l’Europe politique, qui ne peut que naître d’un mouvement internationaliste des exploité·e·s et des opprimé·e·s de tous les pays.

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Manuel Kellner est membre de la rédaction du Sozialistische Zeitung (SoZ), publication proche de l’Isl. Il était de mai 2010 à mai 2012 collaborateur scientifique de Michael Aggelidis, camarade de la Isl, membre de la fraction de Die Linke au parlement de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie d’Allemagne.

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